La Liberté

L'extrême droite fait imploser la droite française

Le président du Rassemblement national (RN) Jordan Bardella a appelé les Républicains "à cesser d'être la béquille politique d'Emmanuel Macron". © KEYSTONE/AP/Lewis Joly
Le président du Rassemblement national (RN) Jordan Bardella a appelé les Républicains "à cesser d'être la béquille politique d'Emmanuel Macron". © KEYSTONE/AP/Lewis Joly
Gabriel Attal et plusieurs de ses ministres ont annoncé qu'ils se présenteront aux prochaines législatives (Archive). © KEYSTONE/EPA/LUDOVIC MARIN / POOL
Gabriel Attal et plusieurs de ses ministres ont annoncé qu'ils se présenteront aux prochaines législatives (Archive). © KEYSTONE/EPA/LUDOVIC MARIN / POOL
Gabriel Attal et plusieurs de ses ministres ont annoncé qu'ils se présenteront aux prochaines législatives (Archive). © KEYSTONE/EPA/LUDOVIC MARIN / POOL
Gabriel Attal et plusieurs de ses ministres ont annoncé qu'ils se présenteront aux prochaines législatives (Archive). © KEYSTONE/EPA/LUDOVIC MARIN / POOL


Publié le 11.06.2024


L'appel en France du dirigeant du principal parti de droite à nouer une alliance inédite avec l'extrême droite a créé un nouveau séisme mardi, deux jours après la dissolution de l'Assemblée et la convocation de législatives par le président qui exclut toute démission.

"Déloyauté", "mensonges", jeu "personnel"... Un déluge de critiques s'est abattu sur le président des Républicains (LR) après son appel à s'allier avec le Rassemblement national (RN) en vue des élections anticipées des 30 juin et 7 juillet, renforçant la crise qui a gagné le pays depuis le triomphe de l'extrême droite aux européennes.

"Nous avons besoin d'une alliance, en restant nous-mêmes, (...) avec le Rassemblement national et avec ses candidats", a déclaré Eric Ciotti sur la chaîne TF1, aussitôt désavoué par plusieurs cadres de son parti qui ont dénoncé un revirement historique.

Tenant d'une ligne dure sur l'immigration, M. Ciotti a fait tomber une digue qui avait jusque-là tenu son parti, héritier déclaré du général de Gaulle, à l'écart de tout accord avec le RN, dont l'ancêtre a été cofondé par un ancien Waffen-SS.

Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, ex-membre de LR rallié à Emmanuel Macron en 2017, a accusé M. Ciotti d'avoir "signé les accords de Munich", paraphés en 1938 notamment par la France et l'Allemagne nazie.

Un autre LR rallié au président, l'ex-premier ministre Edouard Philippe, en a profité pour "tendre la main" aux LR opposés à l'alliance avec le RN.

La charge a aussi été sévère au sein même de LR, que deux influents sénateurs ont quitté en signe de protestation. "Je n'avaliserai jamais, sous aucun prétexte, un accord avec le RN contraire à l'intérêt de la France et à notre histoire", a également lancé le président de droite du Sénat, Gérard Larcher.

"Cordon sanitaire"

Galvanisé par son succès aux européennes, où il est arrivé en tête dans 93% des villes françaises, le RN a, à l'inverse, salué "le choix courageux" de M. Ciotti. "Quarante ans d'un pseudo cordon sanitaire, qui a fait perdre beaucoup d'élections, est en train de disparaître", s'est félicitée auprès de l'AFP Marine Le Pen, patronne des députés RN.

Depuis plusieurs années, le parti cherche à nouer des alliances avec la droite pour poursuivre son entreprise de dédiabolisation et tente d'élargir sa base avant les élections, qui pourraient le porter pour la première fois au pouvoir.

Le RN a en revanche renoncé mardi à nouer une alliance vers sa droite en refusant un accord avec le parti Reconquête! fondé par le polémiste Eric Zemmour, plusieurs fois condamné pour incitation à la haine raciale.

Pendant que la droite se déchire, Emmanuel Macron joue la montre et a reporté à mercredi la conférence de presse prévue mardi pour clarifier son "orientation".

Edouard Philippe l'a égratigné, en se disant "pas sûr qu'il soit complètement sain que le président de la République fasse une campagne législative".

L'ex-premier ministre du président Macron a aussi dit que la dissolution avait provoqué "étonnement" et "parfois de la colère" chez "beaucoup" de Français, du fait du "risque considérable de voir le RN accéder au pouvoir".

Dans un entretien au Figaro Magazine mis en ligne mardi, M. Macron a en tout cas assuré qu'il refuserait de démissionner "quel que soit le résultat" des législatives. "J'y vais pour gagner!", a assuré le président, malgré sa popularité en berne.

Attal mènera la liste

A ceux qui jugent qu'il est "fou" de provoquer un tel séisme alors que le pays s'apprête à accueillir les Jeux olympiques (26 juillet-11 août), M. Macron a défendu une "bonne décision". "Je dis aux Français, n'ayez pas peur, allez voter."

Selon un sondage Harris Interactive - Toluna paru lundi, le RN est crédité de 34% d'intentions de vote au premier tour, ce qui lui permettrait d'obtenir une majorité relative au second, avec 235 à 265 députés, triplant quasiment son nombre actuel de sièges (89). Les macronistes, avec 19%, ne pourraient tabler que sur 125 à 155 sièges.

"C'est moi qui mènerai cette campagne" des élections législatives anticipées pour la majorité, a annoncé mardi sur TF1 le premier ministre, qui avait jugé "soudaine" voire "brutale" la décision du président Emmanuel Macron de dissoudre l'Assemblée nationale.

Gabriel Attal conduira la campagne "en tant que chef de la majorité, premier ministre, avec l'identité qui est la (sienne) (...) c'est-à-dire toujours écouter les Français, même quand ça ne fait pas toujours plaisir ce qu'on entend, essayer de prendre des décisions concrètes, régler les problèmes", avec des "priorités": "les grands services publics que sont la santé, l'école, le pouvoir d'achat et l'emploi, l'écologie

Grandes manoeuvres

Après s'être divisés pendant la campagne des européennes, les quatre principaux partis de gauche (France insoumise, Parti socialiste, Ecologistes, Parti communiste) ont annoncé lundi soir avoir trouvé un terrain d'entente pour présenter "des candidatures uniques dès le premier tour", même si des divergences subsistent.

Cette alliance a été vertement critiquée par le premier ministre Gabriel Attal mardi, jugeant "révoltant" l'alliance avec la France insoumise (gauche radicale), accusée d'ambiguïtés sur l'antisémitisme. Des institutions juives ont dénoncé une "honte" et un "accord infâme".

Les tractations ont repris mardi pour affiner un programme commun et tenter de régler le débat sur le chef de file, plusieurs partis refusant que ce rôle soit joué par le dirigeant de LFI Jean-Luc Mélenchon, figure clivante et ex-candidat à la présidentielle.

En retrait depuis la dissolution, M. Attal est lui sorti de son silence mardi pour assurer qu'il irait "au bout de (s)on devoir de citoyen (...) pour éviter le pire", tout en reconnaissant le caractère "brutal" de la dissolution.

ats, afp

Articles les plus lus
Dans la même rubrique
La Liberté - Bd de Pérolles 42 / 1700 Fribourg
Tél: +41 26 426 44 11